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Requalification contrat d'indépendant en contrat de travail
• Un livreur de repas est lié par un contrat de travail à la société utilisant une plateforme numérique et une application afin d’assurer la livraison à ses clients des repas qu’ils ont commandés auprès de restaurateurs partenaires, nonobstant sa qualité de prestataire indépendant et l’existence d’un contrat de prestation de service dès lors qu’il caractérise la fictivité de son indépendance à l’égard de la société et l’existence d’une véritable relation de travail, la preuve de l’existence d’un lien de subordination juridique permanent étant rapportée (CA Paris 6-7-2022 no 20/01914).
Exécution du contrat de travail
• La clause de dédit-formation, qui a pour objet de prévenir le départ volontaire d’un salarié après qu’il a bénéficié d’une formation financée par son employeur, ne trouve à s’appliquer que lorsque le salarié est directement à l’initiative de la rupture du contrat de travail. Elle ne s’applique pas en cas de licenciement pour faute grave, même si, dans cette hypothèse, le comportement du salarié est indirectement à l’origine de la rupture décidée par l’employeur (CA Paris 22-6-2022 no 19/11399).
• Il est de principe que la mise en oeuvre d’une clause de mobilité incluse dans le contrat de travail correspond à un simple changement des conditions de travail et non à une modification du contrat de travail qui nécessiterait l’accord du salarié. Ainsi le refus du salarié d’accepter un changement de ses conditions de travail constitue une faute contractuelle susceptible de justifier la mesure de licenciement prise à son encontre. Il est de jurisprudence constante que, pour être valable, la clause de mobilité géographique doit définir de manière précise sa zone géographique d’application, que doivent être écartées les clauses évolutives ou celles par laquelle l’employeur se réserve un droit d’extension du périmètre de mutation et qu’une clause de mobilité ne peut conférer à l’employeur le pouvoir d’en étendre unilatéralement la portée. Ainsi, une clause de mobilité sur tout le territoire français n’est ni floue ni évolutive, et s’avère donc opposable au salarié. La clause qui définit son périmètre d’application au territoire national, peu important qu’elle précise que son champ d’application comprend les établissements actuels et futurs de l’employeur, s’avère suffisamment précise quant à sa zone géographique d’application. La mutation de la salariée de St-Raphaël à Clermont-Ferrand en application d’une telle clause de mobilité était donc valide (CA Aix-en-Provence 24-6-2022 no 18/16187).
• Conformément aux articles 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 9 du Code civil et L 1121-1 du Code du travail, toute personne dispose de la liberté de choisir son domicile et nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché. Il est constant que la salariée résidait à St Raphaël depuis plusieurs années, que son conjoint travaillait sur cette commune, que ses attaches familiales se situaient dans le Sud-Est de la France et que la mise en oeuvre de la clause de mobilité nécessitait de fixer son domicile à proximité de Clermont-Ferrand, portant ainsi atteinte à la liberté de choix de son domicile. S’il est certain que la mise en oeuvre par l’employeur de la clause de mobilité, par l’obligation de déménagement qu’elle entraînait, était de nature à porter atteinte à la vie privée de l’intéressée, il apparait que cette mesure, compte tenu de la fermeture du service comptable et faute pour la salariée de rapporter la preuve de l’exercice de sa prestation de travail sous la forme d’un télétravail, était justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché (CA Aix-en-Provence 24-6-2022 no 18/16187).
Licenciement
• L’attitude déplacée, tendancieuse donc inappropriée d’un salarié à de nombreuses reprises à l’encontre de salariées de l’entreprise, et notamment de son assistante, ne peut pas se résumer à un mode de communication courtois, les propos tenus allant au-delà d’un management « proche » de ce dernier avec ses équipes. Toutefois, les propos tenus n’étant ni dégradants ni humiliants, le salarié n’étant jamais insistant dans ses demandes, n’ayant pas commis de pressions graves dans le but apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle et n’ayant jamais créé une situation hostile ou offensante ou intimidante, ils ne caractérisent pas des faits de harcèlement sexuel de la part de l’intéressé. Ce comportement, certes totalement inadapté pour un salarié qui avait une position de responsabilité vis à vis des jeunes femmes qu’il a contactées, plusieurs d’entre elles ayant témoigné de la gêne occasionnée par cette situation qui leur a été imposée par un supérieur hiérarchique, justifie le licenciement pour motif disciplinaire mais, s’agissant d’un excellent collaborateur n’ayant subi aucun reproche tout au long de la longue collaboration, il ne rendait pas impossible son maintien dans l’entreprise et n’était pas constitutif d’une faute grave mais d’une cause réelle et sérieuse de licenciement (CA Versailles 6-7-2022 no 20/01052).
• L’employeur n’étant pas tenu de procéder à une mise à pied conservatoire avant d’engager une procédure de licenciement pour faute grave, l’absence de mise à pied conservatoire ne peut pas être utilement invoquée pour critiquer le caractère de gravité de la faute. Le fait pour un salarié de participer, dans le cadre de son activité professionnelle et en échange de gratifications, à un système de sur-facturation organisé par un sous-traitant du groupe employeur constitue un manquement grave à l’obligation de loyauté imposée par le contrat de travail ; rompant toute confiance nécessaire et indispensable à l’exécution du contrat, de sorte qu’il rendait impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et constitue une faute grave (CA Rouen 30-6-2022 no 19/04623).
• Lorsque les circonstances entourant le licenciement d’un salarié présentent un caractère vexatoire, il est fondé à obtenir des dommages-intérêts distincts de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le fait qu’une salariée ait dû quitter l’entreprise sans les égards dus à ses 30 ans d’ancienneté, du jour au lendemain et sans qu’un pot de départ ait été organisé, et alors que le motif du licenciement ne le justifiait pas, caractérise une attitude fautive de la part de l’employeur. Cette faute constitue une source d’humiliation ainsi qu’un préjudice moral incontestables pour l’intéressée, distinct de celui indemnisé par l’octroi de dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse (CA Paris 7-7-2022 no 19/08849).
• Le salarié qui cumule un mandat social (président du directoire) avec son contrat de travail, n’est pas tenu d’éveiller la possibilité pour l’employeur de se défaire de la clause de non-concurrence dans sa lettre de démission, cette faculté de renonciation étant unilatérale et aucune obligation n’existant à la charge du salarié s’agissant de permettre à l’employeur de lever la clause. Dès lors, il appartenait à l’employeur, dont les membres du conseil de surveillance avaient été alertés de la démission du salarié et de l’existence d’une clause de non-concurrence, de prendre toutes mesures pour procéder à une éventuelle renonciation, faute de quoi la contrepartie financière de la clause de non-concurrence devait être versée (CA Grenoble 28-6-2022 no 20/01272).
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2A avocat
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